Culture > Livres
Henri Filippini: "La BD érotique a connu des années difficiles"
Par Laurent Martinet (LEXPRESS.fr), publié le 27/10/2011 à 11:00, mis à jour à 18:34
Fichier(s) joint(s) :
803124.jpg [ 24.3 Kio | Vu 333 fois ]
Dessin de James Hodges, dont le travail paraissait dans les revues Erotik Story et Sexovid à la fin des années 70.
La Musardine
Henri Filippini, ancien éditeur chez Glénat, fait paraître aux éditions La Musardine la quatrième édition de son encyclopédie de la BD érotique. Pour lui, ce genre est marginalisé et sous-estimé.
Vous dites dans votre avant-propos que la BD érotique véhicule toujours une image négative. Mais cette image sulfureuse n'est-elle pas caractéristique du genre?
La bande dessinée érotique (ou plutôt pornographique soyons sincères dans le terme) a connu des années difficiles. En 1987 des arrêtés du ministère de l'intérieur, dirigé par Charles Pasqua, ont interdit la vente aux mineurs d'une cinquantaine de revues. Comme c'est l'ensemble de la chaîne éditoriale, de l'auteur au libraire, qui était ainsi visée, toutes les BD érotiques ont, par la suite, disparu des librairies. Tant que l'éditeur était la seule victime tout allait bien, y ajouter le libraire a été fatal. Je comprends d'ailleurs très bien qu'un chef de rayon librairie à la Fnac ou en grande surface (lieux où ce genre de BD se vendait le mieux) ne voulait pas risquer son job pour une BD porno.
C'est le courage de Guy Delcourt qui malgré les conseils négatifs de ses avocats et de son équipe a publié l'ouvrage d'Alan Moore et Melinda Gebbie, Filles perdues (2008). Cet album luxueux et cher a tout de suite été réimprimé, attirant l'attention des libraires d'autant plus que les foudres de la censure annoncées ne sont pas venues. Ce fantasme des poursuites envolé les autres éditeurs ont à leur tour osé revenir en librairie avec des titres coquins et les libraires ont suivi. Aujourd'hui la Musardine, Drugstore, Glénat et bien entendu Delcourt rééditent les anciens titres et préparent des créations. Je pense que le créneau va tout naturellement retrouver la place qui était la sienne dans les années 70.
Nouveauté de cette édition, vous faites une toute petite place au manga. Mais dans l'ensemble, vous vous référez plutôt à une tradition européenne. Pourquoi?
Je n'ai rien contre le manga, mais je n'aime pas traiter de ce que je ne connais pas et il est impossible de tout couvrir dans le domaine des histoires en images, tant le champs est étendu depuis quelques années. Je lis plus d'un millier d'albums par an, y ajouter le manga serait impossible. La partie de l'ouvrage consacrée au manga est réalisée par Christian Marmonnier, selon le souhait de l'éditeur. Pour ma part, je trouve le manga distinct du genre BD et préfère ne pas les faire cohabiter. C'est l'option que j'ai prise dans le Dictionnaire de la bande dessinée (Bordas) dans lequel le manga est absent.
Si, dans toute votre encyclopédie, vous ne deviez retenir qu'un seul créateur, quel serait-il?
Georges Pichard est pour moi le Grand de la bande dessinée érotique. A la fois par son talent, par l'intelligence de ses thèmes mais aussi par son courage lorsqu'il s'agissait de défendre son travail. Auteur à succès au cours des années 70/80, il a connu une période d'oubli mais les rééditions de ses oeuvres vont permettre à une nouvelle génération de le (re)découvrir.
Fichier(s) joint(s) :
poster_152737.jpg [ 14.18 Kio | Vu 333 fois ]